Les Raoul à leurs débuts

1er septembre 1980. J’emménage à Villars avec mon associé Dominique C.. J’arrive avec notre camion de sonorisation de concerts. Dominique a démissionné de son poste à l’Opéra de Paris. On s’est rencontrés lors de l’organisation d’un mini festival de musique à Touffailles, bled paumé du Tarn et Garonne.

 

Très vite, on rencontre des musiciens d’Apt, et on nous informe de la création d’un nouveau groupe local « Raoul Petite ». Et, grand hasard, ils répètent juste en dessous de chez nous, au « Clastre ». On les rencontre dans une sorte de grange : une quinzaine de jeunes de notre âge, entre les musiciens et les inévitables groupies. Ça colle vite entre nous et l’on apprend à mieux se connaitre quand ils passent chez nous voir notre super matos : deux tables de mixage (une sur scène pour les retours), quadri-amplification avec filtres électroniques. On fait quelques concerts ensemble, et comme je suis en coulisse à côté d’eux, on discute facilement.

 

Fred, un des guitaristes compositeurs du groupe était élève en 1968 au lycée Lakanal à Sceaux, bahut où j’ai passé une année en Math’ Sup, un peu écourtée par les évènements qu’on connait. Bien sûr on ne s’est pas croisés, mais c’est quand même amusant.

 

Mais il faut que je vous raconte un des hasards hallucinants de la vie. On me présente le batteur, un grand et beau black sympathique, Christophe, et sans savoir pourquoi, je pense à un petit gamin qui participait au match de handball profs-élèves fin juin dans mon lycée. Il marquait un but magnifique, mais plus de quinze ans après, je me suis dit que l’on a du mal à différencier les gens qui n’ont pas les mêmes visages que nous. Plusieurs mois après, attendant qu’une salle de Banon se libère pour un concert, je sympathise avec Christophe et découvre qu’il était élève dans mon lycée de Vitry sur Seine, trois classes en dessous de moi.

On prenait le même bus, le 180, Porte de Charenton-Hôpital psychiatrique de Villejuif (un asile à chaque bout !). J’avais remarqué ce petit noir qui descendait comme moi à « Colonel Fabien », car il y avait très peu de gamins à la peau colorée dans les années 60. C’était bien lui le marqueur de but du lycée Romain Rolland !!! En allant plus loin dans la discussion, je découvre qu’il était ami avec mon copain d’enfance, Jean-Luc. Je me rappelle un jeudi où il y avait ce petit gamin chez Lulu, et que j’avais pris une photo d’eux sur la terrasse. J’étais en troisième, et avais un Kodak Retinette IB.

 

En rentrant à Villars, je retrouve la diapositive dans mes cartons et la mets sur le frigo. Fred passe un jour à la maison et je lui montre la diapo. Un mois après, c’est au tour de Christophe, et là, misère, la photo a disparu ! On ne la retrouve pas, même après avoir déplacé les meubles de la cuisine…

 

François CHAUPITRE

Février 2021